Montréal Underground Origins Blog

À la porte du New Penelope Café avec Allan Youster

30.11.2016

LR: Vous souvenez-vous des concerts donnés par le Peanut Butter Conspiracy ?
AY: Ah ! Le Peanut Butter Conspiracy, l’un des pires groupes ayant jamais joué au Penelope ! Oh mon Dieu ! Ils étaient affreux ! De San Francisco, nous étions un peu nerveux. C’était l’un de ces groupes—et j’étais là tous les soirs— ou le second soir, c’était exactement pareil, note pour note… Nous ne leur parlions même pas beaucoup. Ils sont juste entrés et ont fait un seul concert chaque soir, mais c’était des gens bien, c’était des hippies, alors ouais ! On les a accueilli. L’un des meilleurs groupes qu’on a eu là-bas était The Children of Paradise: Happy & Artie Traum, ce gars Eric Katz… J’ai eu l’affiche et le 45 tours par le groupe… Ils étaient comme un super-groupe folk qui a duré environ 6 mois.
PES.SA.A.0002bdwebLR: Happy Traum n’était-il pas avec Kaleidoscope ?
AY: Ouais, ouais. Happy & Artie Traum, l’un était un des meilleurs chanteurs et l’autre était un incroyable guitariste.
LR: Accueillir un groupe de la côte Ouest devait être une visite spéciale…
AY: C’était très rare. L’une des traditions au Penelope était que le premier soir, qui était le mardi, nous descendions à Chinatown au Sun-Sun Café et nous mangions de la bouffe chinoise avec le groupe et les gens de là… nous connaissions tous la bouffe chinoise… J’ai grandi Juif et nous faisions un repas #1 ou un repas #2, mais le Sun-Sun Café, qui n’existe plus aujourd’hui, avait 319 items à leur menu. C’était la première fois que j’étais introduit à cela ! Et tout le monde commandait un plat, et nous piquions dans les plats de tout le monde. Alors, nous conduisions ce groupe de San Francisco à Chinatown, et on était un peu nerveux, même Gary, je me souviens qu’il disait, « Eh bien, j’espère qu’ils aimeront »… ben, ils ont capoté !

LR: Alors, vous étiez là pour les dernières semaines, la dernière poignée de concerts ? Pouviez-vous ressentir que ça [la fermeture imminente] allait arriver ?
AY: Pas vraiment. En fait, je me souviens quand Gary a rassemblé tout le monde et, je veux dire, les gens pleuraient, les femmes pleuraient, et j’étais pas mal choqué parce que l’endroit s’était incrusté dans moi.
LR: En tant que le gars de la porte, vous n’avez pas vu une chute d’affluence ?
AY: Je n’étais plus le gars de la porte à ce moment-là. J’ai eu une grosse promotion… Au début on avait Mike Bunting qui faisait la cuisine et je faisais la porte. Mike, je pense qu’il faisait plus de LSD que moi c’est certain. Vendredi et samedi sont de grosses nuits, les soirs les plus occupés de la semaine, et il ne voulait plus le faire. Alors un week-end il y avait quelqu’un d’autre dans la cuisine et ça ne marchait pas si bien, ça a un peu énervé tout le monde. Le vendredi ou samedi suivant, il y avait quelqu’un d’autre qui travaillait pendant deux jours et ça [aussi] ça ne marchait pas. Gary vient me voir et me demande : « Aimerais-tu travailler à la cuisine les vendredis et samedis ? » et j’ai répondu : « Comment ça marche ça ? » Il a dit, « Bien, on trouve quelqu’un d’autre pour faire la porte, et tu feras la cuisine. » Je l’ai fait vendredi et samedi. Mon salaire a monté de 6 $ la semaine à 10 $ pour les deux soirs et puis les serveuses partageaient les pourboires avec moi : un autre 15 piastres. Alors ça c’est une promotion ! Après ça, ils ont trouvé pleins de gens pour faire la porte—des cinglés—mais ça n’a jamais marché, et je ne suis jamais retourné à la porte, Gary ne me l’a plus demandé.
LR: Pensez-vous qu’ils laissaient entrer trop d’amis ?
AY: Oh ! Je peux imaginer comment ça aurait pû arriver. Mais à ce stade-là, je n’avais pas besoin de payer pour le concert, je faisais plus d’argent qu’auparavant, je pouvais acheter de la bière… je veux dire, ça c’était bien ! Avec 40 piastres la semaine… Ça allait bien pour moi.
LR: L’une des serveuses a écrit un petit mot sur le groupe Facebook… Je n’ai pas réussi à avoir une réponse, mais elle semble se souvenir des bonbonnes d’oxyde nitreux et des rires.
AY: Je ne pense pas qu’on ait eu de l’oxyde nitreux. Ce que les gens faisaient c’était des contenants de crème fouettée, mais moi je n’avais pas de buzz ! Je trouvais ça un peu bizarre, mais de l’oxyde nitreux, non. L’affaire avec la cuisine était que vous ne buviez pas ou vous ne fumiez pas lorsque vous travailliez à la cuisine. C’était assez intense.
LR: Vous serviez des collations ?
AY: Non. Café, limonade, jus d’orange, chocolat chaud et pour un petit extra, vous pouviez avoir de la crème chantilly sur votre café, mais le chocolat chaud venait déjà avec la crème chantilly dessus. Au mieux, il y avait 200 cuillères, 200 verres—je me souviens une fois nous étions descendus à 150 verres—et il y avait la lessive… Je suis bon à organiser, alors j’apprécie que Gary ait bougé ce petit nerd à la porte—qui ne faisait tout simplement rien… Parfois, lorsque j’étais à la cuisine, je pouvais sortir et regarder le dernier set, les deux dernières chansons. Lorsque les gens ne commandaient plus rien, je pouvais sortir. Mais j’étais là tous les autres soirs de la semaine juste pour assister aux concerts.
LR: Parlez-moi de la ville de New York.
AY: J’ai pu voir Cream à New York. Aller à New York, c’était comme aller à La Mecque. Une fois, j’y suis allé avec mon ami Ed, on avait bu un soir, et nous nous sommes trouvés à aller là-bas. On était là à Café Wha? et on disait « Jimi Hendrix !! Ah merde—la nuit dernière—merde ! » À la porte juste à côté du Café Wha? il y avait le Café à Gogo et là il y avait Cream—ce soir ! C’était leur première tournée et il n’y avait personne ! J’étais assis là, penché en arrière avec mes pieds sur la scène… avec Eric Clapton devant moi ! C’est un petit endroit, il ne pouvait pas y avoir plus de 25-30 personnes. Ce n’était même pas rempli au tiers. L’histoire, c’est qu’ils faisaient leur set et c’était super. Ils faisaient leur premier album—ce n’était pas sorti aux États-Unis, c’était sorti ici et tout le monde se l’arrachait !—et ils finissent le set avec « Toad », laissant Ginger Baker là en train de faire un solo, et ça continue encore et encore.
Et il tombe du tabouret et il reste là, allongé sur le sol. Alors il y a un silence, le band regarde en arrière et le voient allongé, et ils sont assis là à lui parler, en train de porter une cigarette à ses lèvres… et nous sommes assis devant, à regarder ça. Il était blanc et rouge : le visage blanc et du rouge autour des yeux et il trippait trop manifestement ! Ça a duré 10 minutes, mais ils l’ont relevé, l’ont mis sur la batterie et ont terminé la chanson, et voilà qui terminait le premier set. Après une longue pause, ils ont finalement joué un second set. En fait j’ai le programme de cette soirée.
Pour revenir à Montréal—ils jouent à l’aréna Paul Sauvé, et ils étaient bookés pour ouvrir le concert. Sur le chemin en sortant [de la place], ils passent par le Penelope et je suis à la porte et quelqu’un dit : « The Cream sont là ! » Je sors et il y a The Cream dans une limousine, les fenêtres baissées et je les regarde et je vois bien qu’ils ne jouent pas ce soir-là… ils étaient complètement IVRES ! Ce que l’on ne comprenait pas, c’était que le speed à Montréal était meilleur que tout ce qu’ils pouvaient trouver ailleurs, et ils étaient FUCKÉS !! Ils ne pouvaient pas jouer. Les billets étaient pas mal épuisés parce que The Cream sont connus ici, mais The Rabble on dû faire le concert au complet. Ils se sont fait dire qu’ils ne pouvaient pas jouer et qu’ils devaient assurer la soirée ! Je n’étais pas là parce que je travaillais ce soir-là. J’ai entendu dire plus tard que The Rabble étaient un peu nerveux, mais ils ont joué toutes les chansons qu’ils connaissaient et ils ont donné leur maximum.
LR: Pourquoi la limousine était-elle devant le New Penelope ?
a_taylor_05.2bwwAY: Je n’en ai aucune idée.
LR: Ceci était quelques mois après que vous les ayez vus à New York ?
AY: Oh ouais ! Ils étaient en tournée, c’était un tour long et désastreux parce qu’à travers les Etats-Unis, personne ne les connaissait, et ils étaient tellement fuckés !
LR: Parlant de The Rabble, les avez-vous vu en concert là-bas ou ailleurs ?
AY: J’ai vu The Rabble beaucoup de fois. Pimm a une superbe voix.
LR: Vous n’êtes pas uniquement allé au New Penelope, n’est-ce pas ?
AY: Bien, à l’époque, je n’aimais pas aller au Forum pour assister à des concerts, alors je n’y suis pas allé beaucoup… [le son était] terrible, terrible ! Je me suis forcé à aller voir Led Zeppelin à deux reprises et vous pouviez savoir lorsqu’ils changeaient d’accord parce que l’endroit vibrait différemment… J’ai vu Zappa au début des années 1970, là encore, le son était terrible. L’une des choses concernant The Penelope était que le son n’était pas si mal.
LR: Supposément, Zappa était le premier musicien à avoir joué pendant deux semaines lorsqu’ils ont déménagé sur la rue Sherbrooke.
AY: Ouais ! Il était le premier acte.
LR: Supposément, il leur a fait réarranger les haut-parleurs et tout d’entrée de jeu.
AY: Je ne sais pas mais… Je me rappelle en avoir toujours vu deux devant, deux sur les côtés, et de me dire plus tard : « Oh ! C’est comme ça qu’ils font ça ! »

Juan Rodriguez légendaire journaliste rock et son Pop See Cul  
 Garth Gilker du Santropol et le People’s Yellow Pages

Laissez un commentaire

Commentaires

  1. Richard
    jeudi, août 16th, 2018
    J'ai quelques photos des Sidetrak au New Penelope
  2. Richard Duranleau
    jeudi, août 16th, 2018
    J.C. Lewis des Sidetrak etait un cousins des Loving Spoonful.
    Je me souvient bien de Mike Bloomfield jouant avec Paul Butterfield. Il jouait complètement absorbé dans son voyage. Il était vètu d'un chemisier mauve pâle en bas de la ceinture et ses cheveux. Quelle image !
  3. Daniel Kieffer
    samedi, avril 23rd, 2022
    J'ai fait quelques photos De Sonny Terry et Brunie Mc Guee , de Muddy Water et son groupe au New Peneloppe. Je les ai déposées au Musée Mc Cord. Je Pense qu'on peut les voir en Ligne à Fond Daniel Kieffer.
  4. Daniel Kieffer
    samedi, avril 23rd, 2022
    Je regrette beaucoup de ne pas avoir assisté à tous les concerts du New Penelope, je vais voir si mes amis survivants de cette époque ont des documents.
    Bravo pour ce blog.